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Eliud Kipchoge, le marathon se (ré)emballe

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Poste Le 25 avril 2016 par adminVO2

Eliud Kipchoge a réalisé dimanche 24 avril le doublé après sa victoire l’an passé à Londres. Surtout, il s’est approché à huit petites secondes du record du Monde, claquant avec une facilité plus que déconcertante 2h03’05’’ hier dans la capitale londonienne, devant Stanley Biwott, deuxième en 2h03’51’’ et désormais 6e homme de tous les temps …
On pensait cette année que le marathon mondial allait mieux, à l’aune des chronos (un peu) moins rapides que ces derrières années (enfin bon, ils étaient en 2016 quand même sept à afficher une marque entre 2h04’24’’ et 2h05’44’’ avant Londres). Disons que l’on tendait vers une certaine rémission, mais que la température peut vite se réchauffer.
Une certaine rémission, lorsque l’on constate que pas mal de coureurs explosaient après être partis sur des bases élevées. Et, surtout, lorsque l’on se penche sur les chronos de l’ex recordman du Monde Wilson Kipsang (2h03’23’’ à Berlin en 2013) et de l’actuel recordman du Monde Dennis Kimetto (2h02’57’’ à Berlin en 2014). Ce qui nous fait penser à un certain Patrick Makau, qui fut un temps l’illustre (inconnu) recordman du Monde (2h03’38’’ en 2011) et qui court désormais cinq minutes moins vite, soit quasiment deux bornes d’écart…
https://www.youtube.com/watch?v=W1w1mF0HN5Y
Kipchoge, chrono moyen en sept marathons : 2h04’21’’
Kimetto et Kipsang avaient bâché aux Mondiaux de Pékin. Hier à Londres, le premier a couru en 2h07’52’’ (7e), le second en…2h11’44’’ (9e). Presque trois kilomètres de différence avec son record du Monde !!!
Mais le thermomètre est reparti (très) à la hausse avec la performance hier d’Eliud Kipchoge, incontestable number one mondial sur la distance. Le champion du Monde du 5 000 m…en 2003, affiche une insigne régularité depuis ses débuts sur la distance en 2013 à Hambourg :
-Avril 2013, Hambourg, vainqueur en 2h05’30’’
-Septembre 2013, Berlin, deuxième en 2h04’05’’
-Avril 2014, Rotterdam, vainqueur en 2h05’00’’
-Octobre 2014, Chicago, vainqueur en 2h04’11’’
-Avril 2015, Londres, vainqueur en 2h04’42’’
-Septembre 2015, Berlin, vainqueur en 2h04’00’’
-Avril 2016, Londres, vainqueur en 2h03’05’’
Kipchoge, c’est donc sept marathons, six victoires pour une défaite (enfin, on aimerait bien « perdre », ou plutôt finir deuxième, en 2h04’05’’…a fortiori dans la même course où Kipsang avait battu le record du Monde !) et un chrono moyen de 2h04’21’’ !!
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Et depuis septembre dernier, c’est aussi celui qui possède le record du Monde officieux d’un marathon disputé semelles au vent… (lire ici).
A Londres, les plateaux présentent une densité que l’on pense jamais inégalée année après année, mais la course fait souvent pschitt avec cette sempiternelle agglomération de grands noms (encore une fois, façon de parler) en raison de départs souvent beaucoup trop rapides (14’21’’ en 2013 et 14’26’’ en 2014 sur les cinq premiers kilomètres) avant que l’allure ne faiblisse ensuite (2h06’04’’ pour Kebede en 2013 et 2h04’28’’ pour Kipsang en 2014, record de l’épreuve avant hier, tout de même).
Mais cette année…L’allure fut donc endiablée dès le coup de feu, avec des temps de passage inférieurs au record du Monde, alors qu’il était prévu que la course parte sur des bases de 2h03’30’’ (soit 1h01’45’’ à mi-parcours) :
-5 km en 14’16’’
-10 km en 28’37’’ (14’21’’)
-15 km en 43’17’’ (14’40’’)
-20 km en 58’10’’ (14’53’’)
-Semi-marathon en 1h01’24’’ : jamais un marathon n’était parti sur des bases aussi élevées
-25 km en 1h12’39’’ (14’29’’)
-30 km en 1h27’13’’ (14’34’’ ; record du Monde des 30 km, ancienne marque : )
-35 km en 1h42’07’’ (14’54’’)
-40 km en 1h56’49’’ (14’42’’)
-marathon en 2h03’05’’ (les derniers 2,195 km en 6’16’’).
Comparatif des temps de passage des deux derniers records du Monde et du chrono d’Eliud Kipchoge:
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Dans la foulée de ce rythme échevelé, les leaders furent constamment sur les bases du record du Monde : ils furent ainsi sept à passer en 1h01’24’’ à la mi-parcours : le dernier lièvre Gideon Kipketer, ainsi que Kipchoge, Regassa, Biwott, Bekele, Ghebreslassie (le champion du Monde en titre) et Kipsang.
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Après que l’ultime lièvre Gideon se soit écarté peu après le 25e km, Kipchoge, Biwott et Bekele se retrouvèrent tous les trois en tête. Avant que le triple champion olympique ne lâche au 27e.
Record du Monde du 30 km
Le duo Kipchoge-Biwott améliorait ainsi de conserve le record du Monde du 30 km, sept de secondes de mieux que la précédente marque (1h27’20’’ par Edwin Koech en 2016 à Dubaï), et toujours 25 secondes d’avance sur le record du Monde de Kimetto.
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Sauf que là où Kimetto avait enclenché les watts en 2014, entre les 30 et 35e km (14’09’’), le duo « ralentit » (14’54’’) avant de relancer les cinq kilomètres suivants (14’42’’, pareil que Kimetto).
40e km, Kipchoge possède alors neuf secondes d’avance sur Biwott, qu’il vient de lâcher –le même Biwott, qui avait claqué 28’35’’ sur les dix derniers kilomètres pour s’imposer à New York en novembre!- et vingt secondes de retard sur la marque de Kimetto.
Mais il va terminer les derniers 2,195 km en boulet de canon, à près de 21 à l’heure (soit 2’50’’ et quelques de moyenne au km) ! Franchissant donc la ligne en 2h03’05’’, deuxième chrono de tous les temps, à huit secondes du record du Monde (et 46 secondes devant Biwott, 7e homme à descendre sous les 2h04), le tout sans fatigue apparente –ce que sa fin de course est venue corroborer-, les mains sur la tête, prenant conscience qu’il avait échoué si près des 2h02’57’’.
Visiblement, il fut le seul pour qui la température corporelle ne s’est pas emballé…
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Toujours est-il que cela a eu de quoi faire oublier la troisième place de Kenenisa Bekele, qui a bouclé sa première course depuis le janvier 2015 (marathon de Dubaï), et qui revient aux affaires après de multiples blessures et une préparation loin d’être optimale a-t-il assuré (on s’interrogeait ainsi sur son retour, après l’annonce de sa participation à Londres). La veille, son manager Jos Hermens avait déclaré dans L’Equipe : « Pour tout dire, je serais surpris s’il arrivait à courir ici en 2h05’ ».
Il termina en 2h06’36’’, après être parti comme un dératé, donc, toujours sur les bases du record du Monde au 30e km (1h27’25’’) avant d’exploser sur la fin (16’15’’ entre les 35e et 40e km !). Si bien qu’au final et au regard des circonstances de course, l’Ethiopien valait bien 2h05’ avec une allure plus régulière. « Je suis à 90% de mes moyens » avait-il, en sus, souligné avant la course.
La canicule est annoncée en août prochain aux Jeux Olympiques à Rio…
Texte : Quentin Guillon.
Photos : organisation.
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