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Marathon de Bordeaux Métropole, « une expérience sportive différente »  

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Poste Le 17 avril 2015 par adminVO2

Corinne Vannier (ex joueuse professionnelle de tennis, numéro 1 française de tennis en 1982), aujourd’hui directrice France de Lagardère Unlimited Events et directrice du marathon de Bordeaux Métropole, expose les ambitions d’une manifestation atypique qui va réunir plus de 18 000 coureurs, alors que le départ de l’épreuve reine sera donné samedi 18 avril à 20 heures (nos conseils ici).
Pour commencer, qu’est ce qui a motivé Lagardère Unlimited Events à postuler à l’organisation de ce marathon de Bordeaux ?
Lagardère Unlimited est la branche sport du groupe Lagardère. Nous sommes aujourd’hui présents sur tous les métiers du sport (représentation de sportifs, droits marketings, droits télés, organisation d’évènements) et sur les cinq continents. Nous organisons beaucoup d’évènements de masse, en Allemagne, en Angleterre, les marathons de Hambourg et d’Auckland, mais pas en France. Il y a une vraie volonté de développer l’activité « évènements ».
Pourquoi Bordeaux ? C’est l’une des dernières grandes villes de France qui n’a pas son marathon. Cela nous a tout de suite intéressés. La vision qu’avaient le stade Bordelais Asptt et la ville, à savoir de proposer un marathon différent, le premier de France couru de nuit, était très en phase avec notre vision.
Pourquoi privilégier l’approche de masse et pas le haut niveau (prime de 500 euros aux vainqueurs hommes et femmes / 500 euros en bons d’achat pour le semi-marathon) ?
Aujourd’hui, il y a énormément de course. La volonté de la collectivité était d’imposer un marathon qui essaie aussi de générer des retombées économiques et qui soit susceptible d’attirer des coureurs internationaux. Il est impossible de rivaliser avec les tops marathons existants au niveau du plateau, et surtout avec la date que l’on a, entre le marathon de Paris (12 avril) et celui de Londres (26).
Cette année, on a fait le choix d’installer ce positionnement, ce concept d’expérience sportive différente. C’est vrai qu’il n’y a pas de coureurs élite. On tirera le bilan de cette première édition et peut-être que l’année prochaine on essaiera d’attirer des coureurs qui ont un palmarès plus chevronné. On essaie de se construire sur le temps, et de construire un succès dans le temps.

« Nous sommes vraiment dans un registre de tourisme sportif »

 
L’épreuve s’inscrit donc davantage dans une optique d’alliance entre sport et tourisme.
Oui, nous sommes vraiment dans un registre de tourisme sportif. On essaie d’installer une personnalité différente. Pas très loin, il y a le marathon du Médoc, qui est dans un registre très festif (lire ici). La personnalité est complètement différente, mais l’approche -essayer d’attirer une clientèle internationale- c’est ce qu’on veut essayer d’instaurer à terme.
C’est vrai que la performance sportive attire toujours. J’espère que l’on va construire également ça dans les années futures. Mais le parcours a été tracé pour mettre en valeur le patrimoine de la métropole : on passe dans des vignobles, il y a beaucoup de virages dans le cœur historique de Bordeaux, dont on sait que ce n’est pas un parcours pour mettre des records du Monde.
Vous vous attendiez à un tel engouement pour cette première édition ?
Non, d’autant que l’évènement a été lancé en septembre dernier. Ça été huit mois à marche forcée. Il y avait déjà eu des jalons de poser, avec la volonté affichée dans les médias de lancer un marathon (lire ici et , ndlr). Après, quand on a fait la conférence de lancement, on avait une ambition de 8 000 participants. Aujourd’hui, on est très heureux mais c’est aussi un challenge à gérer et j’espère que tout va bien se passer (sourire).
Justement, la logistique doit-être difficile à mettre en place, entre les passages de relais, les départs différés (marathon à 20 heures, semi à 21h30) ?
Oui, c’est un gros challenge. On bénéficie de l’expertise de nos collègues allemands notamment, et de l’organisation de nos manifestations grand public. Une vingtaine de personnes (de Lagardère) sont présents. Et il y a évidemment tous les volontaires du Stade Bordelais Asptt, qui est l’organisateur, ainsi que tout l’apport des services techniques des municipalités traversées. C’est toujours bien de le souligner car l’évènement ne serait pas possible sans eux (sourire).

« Ce sont de beaux chiffres, mais ce n’est pas la poule aux oeufs d’or comme certains ont bien voulu le dire »

 
Il y a eu quelques réactions critiques sur les réseaux sociaux (voir ici, post du 4 février) à propos du prix élevé des dossards (75 pour le marathon, 40 pour le semi), faisait notamment suite à l’officialisation du partenariat conclu avec Nissan, qui accole son nom au marathon.
On est plutôt dans le haut du panier (pour les prix des dossards). J’espère que l’on sera déjà au niveau de l’expérience promise. Après, on est dans un modèle économique, à travers les accords que l’on a, où l’on ne touche aucune subvention financière de la collectivité. Pour financer le budget, nous sommes obligés d’aller chercher des partenaires privés. C’est surtout le naming qui a fait parler, en tout cas localement. Ce sont des pratiques qui se généralisent mais qui sont encore un peu nouvelles. Peut-être que cela a choqué un peu. Que dire ? Je sais que les impôts locaux ont augmenté à Bordeaux ; en tout cas ça ne sera pas à cause du marathon !
Un marathon comme celui des Alpes-Maritimes Nice-Cannes, c’est le conseil général qui est le partenaire titre, mais c’est quelque part le même modèle en terme de pyramide de droits concédés à des partenaires. Mais en termes d’affichage, c’est différent.
Quel est le budget du marathon ?
Il est de l’ordre d’un million d’euros.
Vous devriez être largement bénéficiaires avec les plus de 18 000 dossards enregistrés. 
Non, pas vraiment. Souvent, les gens font des raccourcis au niveau des revenus. Il y a aussi la TVA qui existe en France. Sur les recettes de participants, on enlève déjà 20%. Si on équilibre en première année, on sera plus que ravis. Dans la logique d’un évènement sportif qui se créé, arriver la première année à un « point mort », c’est déjà formidable. Mais on est loin d’autres évènements pour ne citer que le Schneider Electric marathon de Paris, qui est un évènement hors cote.

« Partenariat gagnant-gagnant »

Mais le naming doit tout de même apporter de substantiels revenus.
Oui, oui. En termes de structure, les recettes de participants représentent à peu près 75%. Ce sont de beaux chiffres, mais ce n’est pas la poule aux oeufs d’or comme certains ont bien voulu le dire. L’organisation d’un évènement de nuit est aussi plus couteuse. Il faut le prendre compte.
Quelle est la teneur du partenariat avec la ville ?
En fait, Bordeaux Métropole (ainsi nommée depuis le 1er janvier 2015, ex communauté urbaine de Bordeaux, la Métropole regroupe 28 communes de l’agglomération, ndlr) est notre premier partenaire institutionnel. Comme je le disais, il n’y aucune subvention financière versée. Ils aident en revanche l’association organisatrice au niveau des animations, et mettent évidemment à disposition un certain nombre de matériel, de ressources humaines ainsi que leur expertise -assistance technique, au niveau de la communication pour faire passer les messages sur les problèmes de circulation le jour J- etc etc…
Le teaser avec Paul Renaudie :
http://dai.ly/x1xlk60
Il y a toutefois un accord financier avec le Stade Bordelais omnisports.
Dans le modèle de notre accord, on assume tous les risques financiers. On a essayé d’instaurer un partenariat gagnant-gagnant : au-delà de 10 000 dossards de participants, il est prévu qu’on leur reverse une redevance. Gagnant-gagnant.
10 euros, comme cela a été dit  (lire ici) ?
Tout à fait.
Donc 10 euros x 8 000 dossards ?
Oui ; enfin, ce sont des calculs de nos accords qui sont confidentiels. Mais c’est la mécanique.
Vous avez déjà mis à l’épreuve ce modèle au niveau international ?
Même au niveau international, on s’aperçoit que les collectivités ont de plus en plus de mal pour dégager des budgets et aider les évènements. Donc c’est un peu dans le sens de l’histoire.
Comment voyez-vous le développement à moyen/long terme ?
On va déjà tirer le bilan de la première année, au niveau logistique et de l’expérience sportive. On est vraiment dans le registre d’un évènement populaire. On est donc sur une ambition d’attirer les coureurs amateurs, plus ou moins entraînés et plus ou moins motivés. C’est pour cela que les formules relais permettent d’attirer des pratiquants occasionnels.
Après, on va voir comment on peut gérer l’avenir. La deuxième année sera un challenge. On a 7 000 marathoniens sur le seul marathon, ce qui est un très très beau chiffre. Il va falloir le maintenir, l’améliorer. La distance marathon draine l’évènement en termes d’image. Il y aura forcément des évolutions mais l’ADN de base ne doit pas être modifié.

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