Améliorer son mental : positivez !

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Poste Le 13 novembre 2015 par adminVO2

Après 15 ans de carrière d’athlète de haut-niveau, Annette Sergent s’est aujourd’hui reconvertie en sophrologue et coach sportif au sein de la FFA. Ses dizaines d’années d’expériences et d’observations sur tous les terrains du monde lui permettent aujourd’hui de porter un œil critique sur le comportement des athlètes loisir ou de haut niveau. Dans cette rubrique, intitulée « Etat d’Esprit », elle va vous aider régulièrement à progresser mentalement.
Mon orientation professionnelle en tant que sophrologue et coach sportif s’est dessinée comme une suite logique à ma carrière d’athlète de haut-niveau de près de 15 ans ; elle a été inspirée par ce que j’ai pu observer autour de moi, et par ma propre expérience.
Par exemple, pourquoi une majorité d’athlètes pourtant très forts à l’entraînement passaient à côté de leur épreuve ? Pourquoi je n’étais pas meilleure que d’autres concurrentes à l’entraînement, voire souvent en difficulté, mais pourtant devant en compétition ?
Tout simplement parce que beaucoup d’athlètes perdent leurs moyens :
– soit en amont de la course avec un auto-sabotage dû à des pensées négatives au quotidien: « je n’y arriverai pas, je suis nul(le), les autres sont beaucoup plus forts, je ne sais pas faire », avec pour conséquence la boule au ventre plusieurs jours avant, et une approche de la compétition pas très sympa.
– soit au moment de la course avec un état de panique juste avant l’épreuve à couper les jambes.
Même si l’on arrive à  »sauver les meubles », c’est usant, et le vécu désagréable reste ancré dans la mémoire corporelle, avec de grandes chances pour que le même scénario se reproduise dans une situation similaire ! Surtout si l’explication de la contre-performance passe par des arguments tels que « c’est la faute à pas de chance, à la météo, au rhume attrapé la veille (comme à chaque fois…!), au retard de l’épreuve », etc…
Rien ne me destinait à priori à devenir championne du monde car même si j’étais étiquetée athlète ‘’avec de bonnes dispositions’’, je n’étais pas ‘’douée’’ (je n’étais pas première dans les catégories de jeunes), mais j’ai développé diverses compétences telles que savoir se concentrer sur l’objectif, se mobiliser jusqu’à la ligne d’arrivée, faire abstraction des éléments extérieurs négatifs et au contraire utiliser le positif, gérer l’effort, se transcender grâce au stress, avoir confiance en mes capacités.
Sergent
Un des objectifs était de ne pas abandonner, de me remobiliser pendant la course même si ça ne se passait pas comme prévu, mais aussi de ne pas  »mettre le clignotant » et de passer la ligne; la tentation a été souvent forte mais cela peut facilement devenir un réflexe ! Cela m’a permis d’exprimer 100% de mon potentiel et  je suis devenue une athlète « forte mentalement » au fur et à mesure de ma progression.
Entre autres, j’ai travaillé (sans le savoir) ce que l’on appelle la programmation positive : je me visualisais en situation de compétition avec réussite, plaisir et envie ; outre un travail de développement des sens et de la concentration, ce vécu imaginé a une action sur notre schéma nerveux et notre physiologie ; il va s’inscrire dans notre mémoire comme réalité vécue; petit à petit, ce nouveau message enregistré va remplacer l’ancien. Nous avons donc la capacité d’agir sur certains comportements, et de changer certains réflexes conditionnés.
Le mental, on en parle beaucoup, tout le monde s’accorde à dire que c’est « ce qui fait la différence », mais pourtant on s’y intéresse peu; assimilé à l’aspect psychologique (un athlète est fort ou faible psychologiquement…),  et souvent considéré comme seulement inné, il n’est pas travaillé comme il pourrait et devrait l’être, au même titre que l’endurance et la VMA.
Aujourd’hui je suis coureuse loisirs, et je garde ces bons réflexes. Mon objectif est toujours d’exprimer au mieux mon potentiel du moment, plongée dans  l’ambiance, en vivant bien ma course, sans la subir et sans me mettre en danger. Que l’on fasse de la compétition de haut-niveau ou du sport loisirs, l’enjeu de la course et de la compétition, c’est le jeu : atteindre son objectif mais pas à n’importe quel prix, comme par exemple le Kenyan Eliud MAGUT, au marathon de Padoue le 27 avril dernier qui, victime d’une hypoglycémie essaie de finir le dernier kilomètre ; il tombe à plusieurs reprises, à moitié inconscient, devant des secouristes qui n’osent intervenir car s’ils l’aident, il n’aura plus le droit de repartir, et à côté, cet accompagnateur en vélo qui veille, et pousse son coureur à se relever et à courir encore, afin d’atteindre cette fameuse ligne d’arrivée qui lui donnera droit à la prime convoitée… (il ne pourra finalement pas la passer). Mais je pense aussi à Frédéric, coureur de trail loisirs, qui m’a raconté son abandon lors de l’UTMB après avoir été très loin dans sa volonté de finir : « j’ai arrêté quand j’ai vu traverser des pots de fleur… »

A l'arrivée du marathon de Paris (Photo Yves-Marie Quemener)
A l’arrivée du marathon de Paris (Photo Yves-Marie Quemener)
La course à pied est pour moi un état d’esprit, et le maître mot de la réussite est « équilibre physique et émotionnel », en relation avec son environnement. Préparer une course, c’est se mettre en condition physique et mentale pour être prêt(e) le jour J et vivre sa course de façon optimale. Cela implique de travailler les éléments de base: condition physique générale, posture, foulée, oxygénation, concentration, motivation, gestion des émotions et de la course.
David,  40 ans, est trailer depuis quelques années. Il  a voulu mettre tous les atouts de son côté pour préparer la TDS 2013 (120km avec 7000m de dénivelé) en incluant dans son quotidien et son entraînement des exercices de gestion du stress et de préparation mentale :« J’appréhendais la difficulté de cette course et j’avais peur de l’abandon. Je me suis donc préparé mentalement avec un travail de visualisation et grâce à ça, je suis parti avec un état d’esprit positif pour faire face aux difficultés et accepter les situations d’imprévu ». Cet état d’esprit positif se  »travaille » au quotidien. L’un des mots clef est pour moi « agir » (ne pas subir), sur nos comportements, comme par exemple :
–  s’empêcher de râler tout le temps (sport national paraît-t-il ?…),
– dégager quelques aspects positifs le soir ou au coucher, (si si, sauf catastrophe, il y en a forcément !) de la journée passée et de celle qui va venir.
Sur ce, bon entraînement … physique et mental !
Texte : Annette Sergent (double championne du monde de cross en 1987 et 1989, championne de France de cross de 1981 à 1995, médaille de bronze sur 10 000m aux Europe 1990, trois participations aux JO (1984,1988, 1992).
Cet article sur la manière d’améliorer son mental est paru dans les pages conseils du numéro 238 de VO2 Run, disponible ici. Plus de conseils et bien d’autres choses à lire dans le numéro actuellement en kiosques.

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