Londres 2017 : entre clap de fin et renouveau

Les championnats du Monde s’ouvrent à Londres ce vendredi 4 août, cinq ans après les Jeux Olympiques. Ils seront marqués par les adieux d’Usain Bolt ainsi que de ceux de Mo Farah (avant qu’il ne passe sur la route définitivement), alors que l’équipe de France, sous la houlette de la nouvelle équipe dirigeante André Giraud (président) et Patrick Gergès (DTN), présente un collectif hétéroclite.
Il faudra bien profiter de ces championnats du Monde, deux ans avant le rendez-vous qatari, qui promet un enthousiasme populaire bien moins important…A fortiori sans Usain Bolt, seul athlète capable de rallier des populations non averties à la chose athlétique.
Le Jamaïcain fera ses adieux dans la capitale britannique, sur 100 mètres (finale samedi) et avec le relais 4×100 m. L’octuple champion olympique n’a pas été particulièrement transcendant lors de ces quelques sorties pré-Mondiaux, mais il est passé depuis entre les mains du Dr Müller-Wohlfahrt à Munich, et rappelez-vous Pékin 2015…
Mo Farah tirera lui aussi sa révérence, à domicile et porté par un public qui s’annonce bouillant. De quoi réchauffé celui qui est secoué par les Fancy Bears et par la réputation sulfureuse de son coach Alberto Salazar, très tourné vers l’aide médicamenteuse. Ne serait-ce que prendre le départ du 10 000 m et du 5 000 m s’avérait être une gageure il y a quelques temps.
Mais le Britannique n’en a cure et sera bel et bien le favori pour prolonger sa série d’invincibilité en grands championnats, entamée sur 5 000 m à Daegu en 2011. Battra t-il son record de 2015 à Pékin et un dernier mile bouclé en moins de 2’20 » sur son 5 000 m !?
Il est aussi pressenti pour être l’un des premiers à répondre aux questions sur le dopage, et ce dès vendredi soir à l’issue du 10 000 mètres.
Car l’athlétisme traverse actuellement une période bien peu faste, où sa crédibilité est sans cesse remise en question, et l’où se demande combien de podiums seront réécrits dans les années qui viennent…
C’est ainsi que la Russie est toujours officiellement suspendue, et ce sont 19 athlètes russes qui seront présents à Londres…sous bannière neutre. Mais s’il n’y avait que la Russie ! Bref…
L’autre gros point chaud de ces championnats est annoncé sud-africain, avec le recordman du Monde du 400 mètres Wayde Van Niekerk, favori sur le tour de piste et qui s’alignera aussi sur 200 mètres. Il est le premier athlète à avoir franchi et la barre des 10’’ sur 100, 20’’ sur 200 et 30’’ sur 300 (et bientôt moins de 43’’ sur 400 m – 43’’03 à l’heure actuelle- ?!)
Mayer favori au décathlon
53 athlètes vont représenter l’équipe de France après les forfaits de Floria Gueï et d’Eloyse Lesueur qui s’ajoutent à ceux de Pascal Martinot-Lagarde, Dimitri Bascou ou encore Teddy Tamgho, qui n’a pas sauté de l’année, sans donner d’explication.
Le recordman du Monde de la perche Renaud Lavillenie, qui vit actuellement une saison en dent de scie (suite à une blessure cet hiver) sera l’un des meilleures chances de médaille, lui qui fut champion olympique ici-même en 2012. Le titre mondial est le seul qui manque à son palmarès, alors que le champion olympique brésilien Thiago Braz a annoncé son forfait.
Lavillenie, 4e au bilan mondial (5,87 m), arrive à Londres en position d’outsider –l’Américain Sam Kendrics a réalisé les deux meilleures performances de l’année, avec une pointes à 6,00 m.
Vice-champion olympique à Rio, Kévin Mayer a désormais la voie libre sur le décathlon, après qu’Ashton Eaton eut mis fin à sa carrière.
Triple médaillé olympique, Mahiedine Mekhissi sera candidat à une sixième médaille planétaire, lui qui s’est visiblement bien remis de son hiver compliqué par des tendons douloureux. Les Kényans et l’Américain Evan Jager seront ses principaux adversaires.
A suivre également les lanceurs Mélina Robert-Michon (disque) ainsi qu’Alexandra Tavernier et Quentin Bigot (outsiders au marteau). Garfield Darien aura un coup à jouer sur 110 m haies, de même que Yohann Diniz (50 km marche), qui n’a pas connu une préparation des plus sereines, tout comme Pierre-Ambroise Bosse, qui pourrait toutefois tirer profit du forfait du double champion olympique David Rudisha.
A l’instar de Jimmy Vicaut (100 m) et Christophe Lemaitre (200 m), eux aussi ralentis par des pépins physiques et qui ne semblent pas arriver avec la plénitude de leurs moyens physiques.
Une sélection ouverte : quelle cohérence ?
Pour le reste, l’équipe de France comptera pléthore de nouvelles et nouveaux capé(e)s, dont beaucoup ont été sélectionnés sans avoir réalisé les minima requis (ah pardon, le niveau de performance). Que celui qui parvient à lire la cohérence des choix de sélection lève le doigt bien haut ! A mettre en parallèle aussi avec l’incohérence ayant aussi prévalu dans les sélections de jeunes cet été.
Non pas que l’on critique l’ouverture de la sélection. Au contraire. Mais pourquoi ne pas avoir placé d’emblée les minima IAAF comme base de sélection, plutôt que des minima fédéraux plus élevés et indexés sur un niveau mondial souvent biaisé par le dopage (bien que cette année, ils aient été relevés dans quelques épreuves chez les seniors, alors qu’ils furent durcis chez les jeunes (1) ).
A quoi bon instaurer un niveau de performance s’il s’agit de passer outre (on songe aussi à celles et ceux qui ont été recalés dans un passé récent pour quelques centièmes ou secondes) ?
L’on peut ainsi s’interroger sur la crédibilité future de la DTN auprès des athlètes et des entraîneurs quant au prochain mode de sélection (que faudra t-il croire?), alors que certains athlètes ayant bénéficié de ces ouvertures de sélection par le passé avaient davantage joué aux apprentis touristes qu’aux apprentis champions du Monde…
A celle et ceux qui n’ont pas passé le cut requis de se mettre en pièces sur le tartan londonien pendant ces dix jours.
Le programme des championnats du Monde de Londres jour par jour ICI.
(1) Si bien que l’espoir Gautier Dautremer a glané le bronze aux championnats d’Europe espoirs sur 200 mètres en 20 »66, record personnel. Alors que les minima étaient fixés à…20 »60. Comprenne qui pourra.
Photo de une : Kévin Mayer lors des Jeux Olympiques de Rio (Getty Images © Copyright).